Une révolution d’amour
Carnet de voyage au pays de la révolution bolivarienne (Meriem Andalounès)
Je vis des journées exceptionnelles à Caracas. Je ne crois pas qu’il existe un autre pays au monde où il se passe des choses comme celles que je vois ici.
Mes journées commencent à 7h du matin et se terminent vers 23h. Grâce à Jean Araud, à sa gentillesse, à sa disponibilité et à son aide précieuse, je suis en contact direct avec la révolution bolivarienne. Mais de toute façon, elle est dans la rue, visible, partout, disponible, généreuse, démocratique.
Aujourd’hui, 1er novembre, par exemple, j’ai assisté et participé à deux émissions de radio en direct live de la Place Bolivar à 11h du matin et de la Place Candelaria à 19h. Ces émissions sont retransmises en direct sur des radios nationales alternatives et trois chaines de télévision nationale dont celle de l’assemblée nationale, et sont animées par des « communicateurs sociaux » dans des places très fréquentées de la ville. N’importe qui peut donc venir intervenir en direct à la radio et être écouté par des milliers de personnes. J’ai pu assister à d’innombrables interventions de grande qualité. Je suis impressionnée par la consistance intellectuelle, l’esprit critique et la structure de la pensée de toutes les personnes que j’ai entendues ici.
Vu de France ou d’ailleurs en occident, vous vous dites certainement que je suis victime de la propagande chaviste et que je me fais manipuler. Ou peut-être pensez-vous que c’est moi qui essaye de vous manipuler. Bref, vous vous méfiez. Dans un monde comme celui dans lequel nous vivons, cela relève plutôt du bon sens.
Mais ici, c’est un autre monde qui se déroule sous mes yeux. Aussi incroyable que cela puisse paraitre, les gens sont heureux dans ce pays ! Mais ils continuent la lutte, ils pensent à vous. Ils savent ce qu’il se passe dans le monde, en France, en Europe, en Afrique, au Moyen-Orient. Ils me parlent de la Syrie et de la Palestine. Ils me demandent quand va se réveiller le grand peuple de France. Ils connaissent l’histoire de France, me parlent de la Commune de Paris et me disent que le président Chavez l’a citée en exemple pour les Conseils communaux d’ici. Ils me parlent de la révolution française et sont très fiers que le nom de Francisco Miranda figure sur l’Arc de Triomphe. Ils vous envoient à tous des messages d’amour et de fraternité que vous pourrez voir sur les vidéos que j’ai prises. Ils vous invitent à venir voir de vos yeux ce qui se passe ici et ce que représente pour eux cette révolution et leur président Chavez tant aimé.
Il y a aussi ceux qui n’aiment pas tout ça. Ils sont quand même six millions et sont donc difficiles à ignorer. Je n’ai pas discuté avec beaucoup d’entre eux pour le moment. J’espère que j’aurai l’occasion. L’échange prévu entre Jean Araud et un farouche opposant devant ma caméra n’aura pas lieu. L’opposant a annulé car il ne connait pas Jean et ne sait pas à quoi s’attendre. Bon… Jean m’a dit qu’on allait en trouver d’autres. Par contre, j’espère quand même faire l’interview de l’opposant en question.
Sans vouloir entrer dans la caricature, le peu d’opposants que j’ai vus jusqu’à maintenant sont des gens qui vivent à Caracas en ignorant complètement leur compatriotes. Ils sont moins informés que moi sur ce qui se passe à deux rues de chez eux. Ils sont dans leurs quartiers huppés et n’en sortent jamais. Ils s’expriment autant qu’ils veulent, possèdent des chaines de télévision et de nombreux journaux. Ils passent leur temps à dévaloriser le processus bolivarien mais cela ne les empêche pas d’aller se soigner dans les CDI (centre de diagnostic intégral) chez les médecins cubains ou d’étudier à l’université bolivarienne gratuite et de grande qualité. Ces gens vivent à Caracas comme on vit à Miami ou dans le Marais à Paris. Ils regardent des talk-shows américains le soir à la télé, ont des grosses voitures et répètent à qui veut l’entendre qu’ici on ne vit pas bien, que c’est une démocratie de façade, que c’est dangereux et que le gouvernement ne fait rien, qu’il ne tient aucune de ses promesses, qu’il n’y a pas de production locale, qu’il y a trop de pauvres et que le gouvernement ne fait rien pour eux.
Tout cela est le contraire de la vérité ou au mieux des constats biaisés.
Prenons par exemple le problème de l’insécurité qui est indiscutable. Les grandes villes du pays sont extrêmement dangereuses. Tout le monde me répète qu’ici je peux être tuée pour un téléphone portable. Ça n’a pas l’air de rigoler, même si pour le moment, Dieu merci, je n’ai vu aucune violence. Ce problème d’insécurité extrême est bien réel et jusqu’à maintenant, il est vrai que le gouvernement de Chavez n’a pas réussi à l’éliminer. Mais elle n’est pas de son fait. Elle le précède. Dire que rien n’est fait est le contraire de la vérité. On peut dire que les solutions pensées par le gouvernement n’ont pas encore porté leurs fruits mais on ne peut pas dire que rien n’est fait. Et il ne faut pas oublier que le problème de la violence est un véritable fléau en Amérique Latine. Voyez la Colombie, le Brésil, etc. Ces pays non plus n’ont pas réussi à éradiquer cette violence terrible dans laquelle les trafics de drogue jouent un rôle central. Comment faire pour déloger ces trafiquants et ces grands bandits des favelas ou des ranchos dans lesquels ils sont maîtres ? Leur envoyer l’armée, les bombarder ? C’est vérolé depuis très longtemps et donc très difficile a résoudre. Je ne cherche pas à excuser le gouvernement mais Hugo Chavez a d’abord cru qu’en luttant contre la pauvreté, la violence allait suivre automatiquement. Or, il a réussi à diminuer de manière impressionnante la pauvreté dans le pays (aujourd’hui tout le monde peut manger à sa faim et avoir trois repas par jour minimum) mais au niveau de la violence, les choses n’ont pas changé. L’autre problème du Venezuela est que chaque Etat a sa propre police, ce qui a entrainé une corruption assez monstrueuse d’après ce que j’ai entendu ici. Le gouvernement est actuellement en train de former une Police nationale (appelée ici la Police bolivarienne) qui servira dans l’ensemble du territoire. La formation de ce nouveau corps de sécurité prend du temps car il s’agit de s’assurer de la probité des agents et de leur faire prendre conscience de leur rôle dans la société. Pour les gens de France, cela peut paraitre préhistorique. Mais il faut savoir que nous sommes ici dans un pays où la police municipale a par exemple tiré sur le peuple lors du coup d’Etat contre Chavez en avril 2002 sur ordre de l’opposition. Ces agents de police municipale ont d’ailleurs été condamnés à 30 ans de prison grâce à une femme photographe que j’ai interviewée hier et qui les avaient pris en photos. Par la suite, elle a été menacée de mort et on est même venu à son bureau en lui plaquant un pistolet sur la tempe pour qu’elle donne les photos. Elle m’a raconté lors de notre entrevue comment elle a fait pour s’en sortir, vous allez être sciés par le sang froid de cette femme.
Quant à dire, de la part des gens de l’opposition, qu’il y a trop de pauvres et que le gouvernement ne fait rien pour eux, c’est d’un cynisme sans nom. Ils n’en ont strictement rien à cirer des pauvres. J’ai envie de leur répondre : qui sont les 55% de vénézuéliens qui l’ont réélu pour la 4ème fois comme président et qui ont confirmé ses mandats, ses projets et ses amendements lors de 13 élections différentes en 14 ans de pouvoir ? Certainement pas la bourgeoisie. Quel président peut se vanter d’avoir gagné 13 élections démocratiques ? Oui démocratiques ! Même l’opposition ne nie pas la transparence du scrutin. L’ancien président américain Jimmy Carter a déclaré lors des élections du 7 octobre dernier que « le système électoral vénézuélien est le meilleur au monde tandis que celui des Etats-Unis est l’un des pires qui soit ».
Il est très tard, j’aimerais continuer à vous raconter ce que je vis ici. Vous ne perdez rien pour attendre. J’ai déjà de quoi faire un film magnifique dans mes tiroirs. J’espère avoir de l’aide à mon retour en France pour les sous-titres et le montage car ce que je rapporte est un témoignage fabuleux et une preuve vivante qu’un autre monde est possible. Dans la paix, la démocratie effective et l’amour.
Ici on parle tout le temps d’amour, sans complexe.
Je vous laisse avec ces quelques photos.
Bisous, besos.
Suivez le voyage de Meriem Andalounès sur son blog
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Les médias disent toujours tout et son contraire. Au débût, méfiant sur Chavez, je les croyais quant ils parlaient d’un bonhomme de foire. Maintenant, Dieu sait que même si je ne suis pas Chaviste je souhaite aux Vénézuéliens de ne pas tomber aux mains des banquiers et autres sociétés privées qui, d’après ce qu’on voit, finance l’opposition ultra-libérale.
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