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Economie informelle en Algérie : L’informel, le formol et le formel

Parti-pris venu d’Algérie pour l’éradication de l’économie informelle, qui selon l’auteur nuit aux intérêts nationaux et avantage les puissances exportatrices.

A défaut de stratégie de développement économique, les membres du gouvernement mettent en exergue les mesures prises pour éradiquer le marché informel tout en sachant que leurs actions seront vaines. La volonté politique prévalant actuellement préfère la paix sociale aux dépens même de tout ce qui est légal. Hernando de Soto, expert international péruvien estime qu’ « éradiquer l’économie informelle est essentiellement un acte politique ». (1).

Le directeur général de la réglementation des activités et de l’organisation au Ministère du Commerce Monsieur Ait Abderrahmane Abdelaziz parlant du marché informel précise que ce « secteur emploi 40.000 personnes est presque une utopie, surtout que l’Etat se déclare impuissant d’éradiquer » (2), d’autant plus que le nombre de marchés parallèles à travers le territoire n’est pas maitrisé.

Les experts estiment que cette économie souterraine est proche de la moitié du PIB, elle est d’environ 40% à 45 % du PIB. Le PIB de l’Algérie est de 183 milliards de dollars pour l’année 2011 (3) . Plus de 70 milliards de dollars alimentent ce secteur.

Face à cette véritable gangrène pour l’économie nationale, les responsables du gouvernement affichent des positions fermes pour l’éradiquer et agissent autrement sur le terrain allant jusqu’à reconnaitre son rôle majeur dans la stabilité de l’économie. Ainsi si des mesures radicales ne sont pas trouvées, cette économie souterraine sera dominante en Algérie. Elle le sera certainement car l’importation est privilégiée à la production nationale. Monsieur Hamiani, Président du forum des Entreprise estime que l’importation est responsable du marché informel « la circulation d’argent hors circuit bancaire est d’environ 35 milliards de dollars (340 000€) ». (4)

35.000 importateurs inscrits sur le registre de commerce, 15 000 figurent sur dans le fichier national des fraudeurs en Algérie » (5) et la quasi – majorité des 20.000 restants vise le gain facile, l’enrichissement illicite et l’évasion fiscale et ne déposent leurs comptes sociaux. L’Etat Algérien aurait perdu 10 milliards d’euros durant les trois dernières années.

L’absence de la volonté politique du gouvernement à lutter réellement contre le marché informel en dépit d’un dispositif législatif et règlementaire mis en place depuis des années s’illustre à travers :

La non – application de la loi de finances complémentaires de 2010 : l’application de la disposition relative à l’utilisation du chèque pour le payement de toute transaction dépassant 500.000 DA (5€) qui devait entrer en vigueur le 31 mars 2011. Le ministre du commerce avait déclaré « nous n’avons pas abandonné cette mesure. Nous avons juste décidé de différer son application pour mieux préparer le terrain » (6) –

La non – facturation des fournitures et services : cela induit un manque à gagner pour l’administration fiscale qui ne prend en otage que les fonctionnaires dont la retenue est opérée à la base. 156 milliards (1,7 millions d’euros) de transactions sans facturation entre 2000 et 2011. (7). Le défaut de facturation aurait « atteint 1.000 milliards de dinars (9,7 millions d’euros)» selon le directeur cité plus haut.

La non – application de la réglementation de changes : par la création de bureaux officiels de change tel que prévu par la loi, et l’élimination du marché parallèle de la devise.

Aucune opération aussi draconienne ne pourra venir à bout de ce secteur, si ces trois mesures ne sont pas appliquées immédiatement. Elle ne demande aucune préparation de terrain mais de la bonne volonté des responsables du Commerce et des Finances. Hélas ! L’acte politique est absent.

Le ministre de l’Intérieur Daho Ould Kablia,  qui compte éradiquer le marché informel, a déclaré : « On essaye de combattre ce genre de marché informel de la devise, mais les citoyens trouvent leur compte. Je ne trouve pas d’inconvénients à ce qu’on le supprime ou on le laisse ». Il reconnait que c’est « une activité illégale » (8)-. Et ajoute : « L’Etat n’est pas disposé à ouvrir des bureaux de change » occultant les menaces qui pèsent sur l’économie nationale.

Un blanchiment d’argent formalisé.

Le ministre des finances Karim Djoudi a contredit son homologue de l’Intérieur en déclarant « la loi ne permet pas l’existence d’un marché parallèle de la devise…..dans l’économie, il existe un marché officiel, il n’y a pas de place pour le marché noir » » (9)

Tout ce qui est illégal doit être interdit“. Cette maxime ne semble pas guider les convictions de ce Daho Ould Kablia qui, contrairement à Alan Jay Perlis qui déclarait récemment « On ne peut aller de l’informel au formel par des moyens formels » peut aller de l’informel au formel en utilisant le formol.

Nonobstant l’impuissance des pouvoirs publics face à ce fléau qui ronge le pouvoir d’achat des citoyens, un programme de réhabilitation * des marchés a été examiné par le comité inter ministériel. Ce programme est doté d’une enveloppe globale de 20 milliards (190 000 euros)  (5,9 milliards de DA dudit comité, 10 milliards de DA du ministère du Commerce et 4 milliards DA du ministère de l’Intérieur).

Les pouvoirs publics incapables de s’attaquer au puissant lobby de l’import usent de l’alchimie pour réhabiliter l’Etat. Pour que l’informel devienne formel, Ils le font tremper dans du formol…

Ses caractéristiques permette la conservation, symbole du statut quo en faveur de l’ordre établit.

Rendre formel l’informel par le formol mériterait certainement un prix Nobel de l’alchimie !

*- Le terme réhabilitation a été utilisé la 1ère fois en Algérie, après la démission du président Chadli Bendjadid en janvier 1992, par le Haut conseil d’Etat. Cet Organe, dans sa lutte contre le Front Islamique du Salut s’était fixé comme objectif la réhabilitation de l’Etat et par conséquent l’amélioration des services publics. Depuis l’Etat est à la recherche de sa réhabilitation dans tous les secteurs.


REFERENCES :
1- Journal le Jeune indépendant du 04 avril 2012
2- la tribune du 23 mars 2012
3- archives du FMI pour l’année 2011 publié sur son site.
4- Echo news du 16 octobre 2012.
5- Ubiz news du 13 mars 2012 ???
6- Algérie 360 du 12 mars 2012
7- la tribune du 12 mars 2012
8- El Watan du 21 octobre 2012
9- TSA : tout sur l’Algérie du 23 octobre 2012

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