Rencontre avec Etienne Chouard ou l’émancipation des “Gentils Virus”
Au commencement, il y avait Étienne Chouard :
“Ce n’est pas aux hommes du pouvoir d’écrire les règles du pouvoir !”
Ce slogan résume bien les travaux d’Étienne Chouard, professeur d’économie et de droit à l’Université de Marseille. C’est lors du débat sur la constitution européenne de 2005, qu’il se fit connaitre. Il publia un article d’une vingtaine de pages décrivant point par point, les raisons de la refuser. Ce compte-rendu fit rapidement le “buzz” sur la toile. Depuis, il invite l’électeur à se transformer en citoyen, autrement dit, à devenir autonome, à fixer lui-même les règles auxquelles il consentira à se soumettre. Il s’inscrit de ce fait, dans la lignée de Rousseau et son contrat social.

De conférence en conférence, il souligne l’importance qu’il faut accorder à notre Constitution, règle suprême qui s’impose à nos représentants. Les règles qui fixent les limites du pouvoir.
“Tout pouvoir sans bornes ne saurait être légitime” disait Montesquieu. C’est exactement le rôle de la Constitution : assurer la souveraineté du peuple, obliger ses représentants à rester les serviteurs de l’intérêt collectif.
Ses recherches sur la cause de l’impuissance politique des peuples face aux injustices sociales et économiques l’amènera à formuler une question très simple : comment un professionnel de la politique peut-il écrire les règles suprêmes qui s’imposeront à lui ? Si les représentants doivent craindre la Constitution, doivent-ils l’écrire eux-même ? Demanderait-on à un juge de se rendre lui-même justice ?
L’évidence de ce conflit d’intérêt, une fois formulée, est désespérante.
Désespérante ?
Oui ! Pourquoi a-t-il fallu attendre si longtemps pour que notre conscience collective soit en mesure de “fabriquer” un individu capable de formuler cette anomalie ?
L’ignorance ? Qui parmi vous, avait conscience que la Constitution prémunit le peuple des abus de pouvoir ?
Si une Constitution est si importante pour le peuple d’une nation, ne trouvez-vous pas étrange que notre éducation républicaine (éducation verticale, des élites vers le peuple) ne nous sensibilise pas davantage sur ce point central ?
Est-ce la résultante d’un non-dit, d’un inconscient collectif, une idée qu’on ne souhaite pas voir, qu’on ne voudrait surtout pas connaitre ?
Pour les uns parce qu’il leur permet de pérenniser leurs avantages. Mais pour les autres ? La fuite des responsabilités ?
Replongez-vous un peu dans votre enfance. Imaginez vos parents parlant de leurs problèmes d’adultes, ne vous précipitiez-vous pas dans votre chambre pour jouer, pour vous divertir, pour détourner votre attention sur ce qui vous attendra, inexorablement, un jour ou l’autre ?
Peu importe les raisons de ce silence au sein des divers débats publics, le message d’Étienne Chouard a reçu de nombreux échos. L’idée se diffuse, progressivement, mais surement. Elle s’est, entre autres, cristallisée chez un petit groupe appelé les “Gentils Virus”.
Au commencement, quelques balbutiements, maladroits, hésitants, les idées s’articulent – péniblement – et rencontrent de nombreuses résistances issues des croyances “républicaines” dominantes. Oser remettre en cause l’élection ? Hérésie !
Les abeilles à peine formées ont régulièrement besoin de revenir à la ruche, butinent par-ci par-là de nouveaux arguments, acèrent leur dards. Cela nécessite du temps, du travail, de la persévérance. Toutes, ne se sentent pas la pugnacité de piquer les idées reçues. Une sélection naturelle s’opère.
Bientôt tout le miel sera digéré, le processus d’identification touche à sa fin. Les voilà prêtes à créer leur propre ruche, à produire leur propre miel.
Aujourd’hui, L’association “Citoyen Constituant”:
La rencontre du 20 mai dernier a été l’occasion pour les “Gentils Virus” de présenter leur projet : la création d’une association dont le rôle sera de promouvoir la démocratie (à ne pas confondre avec notre actuel système politique : le gouvernement prétendument représentatif) ainsi que le principe sur lequel il fut fondé : le tirage au sort. Ils se proposent de le réactualiser dans notre conscience collective. De le dépoussiérer. Forcer la négation de l’élection, aujourd’hui triomphante. Négation nécessaire à l’engendrement d’une nouvelle synthèse.

Il serait trop long d’exposer ici l’idée du tirage au sort et cela nécessiterait, au minimum, un article à lui-seul. Sachez simplement que si cela semble, à première vue, relever d’une nouvelle lubie – tant elle nous est étrangère aujourd’hui – elle fut en vérité, très discutée, par de nombreux intellectuels, lors des premières révolutions modernes. C’est une vieille idée, une vieille pratique même, que celle du tirage au sort. Néanmoins l’élection est aujourd’hui la seule survivante de cette dialectique métapolitique, la seule a être actualisée dans notre conscience collective.
Et pourtant, de l’antiquité jusqu’à la révolution française, aucun penseur ne pensait faire de l‘élection l’instrument central d’une démocratie. En effet, tous reconnaissaient que par sa nature, par sa mécanique, l’élection était aristocratique. Le tirage au sort, quant à lui, semblait être le plus apte à respecter la stricte égalité des candidats. Pourquoi ce glissement conceptuel ? De quoi éveiller la curiosité non ?
L’association “Les Citoyens Constituants” ne représente aucun parti. Elle est trans-courant, ouverte à tous. Là où l’organisation partisane de la politique divise les français, elle souhaite rassembler autour du plus petit dénominateur commun : lutter contre l’impuissance politique populaire.
Elle vise à transformer l’électeur en citoyen. A le faire réfléchir sur les causes de son impuissance politique. A transformer l’actuelle résignation générale en activisme grâce à une éducation populaire.
Ils prônent une Constitution où figurerait les principes démocratiques : rotation des charges, des mandats courts, non cumulables et non renouvelables, une stricte séparation des pouvoirs, la reddition des comptes, les referendums d’initiative populaire, etc.
D’ailleurs, l’association promeut ce qu’elle s’applique à elle-même. Les pouvoirs exécutifs, législatifs, judiciaires, médiatiques et d’ordre financiers de l’association sont séparés et exercés par des personnes différentes (dès que le nombre de membres actifs le permettra) tirées au sort et contrôlées à tout moment par tous les membres de l’association. Les membres auront la possibilité de déclencher des referendums pour créer, modifier ou supprimer des articles du règlement intérieur.
Au delà de promouvoir à l’extérieur les principes démocratiques, c’est l’occasion d’expérimenter au sein d’une association, le fonctionnement d’une démocratie authentique.
Demain, l’émancipation de l’utopie* “chouardesque”?
* Comprenez par utopie, non pas le sens actuel que nous lui donnons : une construction imaginaire dont la réalisation pratique est, à priori, impossible. Nous parlons ici d’une idéologie sans praxis, d’une idée privée de son expression comportementale. Vous comprendrez ainsi que toute organisation politique et sociale effective a été une utopie avant de s’objectiver. Avant d’être institutionnalisée.

Si les générations des Trente Glorieuses n’avaient aucune raison de s’interroger sur la question de la constituante, il en est tout autrement de celles issues des Trente Calamiteuses. Après tout, le fonctionnement d’une chose est ignorée jusqu’à ce qu’elle fasse défaut. Économie d’énergie oblige.
La globalisation des marchés, la lutte contre l’inflation (qui se paye en chômage), le “problème” de la dette (des pays qui font trop la fête), le besoin de réformer la France (à commencer par ces fainéants de retraités), les politiques immigrationnistes (t’es contre l’immigration ? raciste !), la nécessité de l’Union Européenne (t’es contre une union? fasciste !), le transfert des pouvoirs régaliens au profit d’une institution supra-nationale (battre monnaie, politique budgétaire).
Autant d’orientations politiques préconisées par les experts qui défilent à tour de rôle sur les différents médias. Et pourtant, force est de constater l’écart abyssal entre leurs prédictions (réformes pour un monde meilleur) et la réalité (réformes pour le meilleur des mondes, clin d’œil à l’œuvre de Huxley).
A force de se répéter, leurs arguments finissent par ne plus tromper.
Personne ne peut prétendre détenir la vérité, tout au plus une opinion, dépendante elle-même d’un déterminisme sociologique : le point de vue à partir duquel nous parlons.
Pendant une trentaine d’années, les électeurs naïfs écoutèrent attentivement les préconisations venues d’en haut, intégrant sagement la logique de nos “maitres à penser”, s’adaptant au mieux à la nouvelle idéologie. Au nom de la sainte croissance, hélas portée disparue ! Avis de recherches, toutes les brigades sont sur le coup, retroussez vos manches petits soldats, il faut absolument la retrouver !
Il est d’ailleurs particulièrement troublant d’entendre aujourd’hui encore, nombre de personnes défendrent ces idées. Mais l’inévitable arrivera. Il n’est guère possible de fonctionner indéfiniment avec le réseau de croyances d’une classe sociale dont on ne fait pas partie. La contradiction entre les idées subjectives et les conditions matérielles objectives ne peut aboutir qu’à une prise de conscience au mieux, à une dépression au pire.
Quelques exemples : “je me revendique favorable à une ouverture des frontières et pourtant ça plombe les créateurs d’entreprises.” “Je suis pro-immigration mais je constate une baisse de mon pouvoir d’achat. ” “Je suis autant pour l’Union Européenne que pour la démocratie, et je constate néanmoins que ce sont des technocrates non-élus qui décident de la politique de mon pays”, etc.
C’est toute la tragédie actuelle : s’approprier une pensée qui sabre ses propres besoins. Il est l’heure de s’identifier à d’autres modèles messieurs dames !
Cela montre la nécessité d’une éducation populaire.
L’idée d’une assemblée constituante tirée au sort n’appartient désormais plus qu’à quelques pionniers. Leur principale mission, pourrait-on dire, s’achève. De nouveaux adeptes prennent le relai. L’utopie “chouardesque” entame sa généralisation, étape nécessaire à sa pérennisation.
Certes, elle se trouve encore en marge des sujets politiques actuellement traités dans les médias dominants. Mais sur la toile, c’est indéniable ! Il se passe quelque chose. Internet est devenu le média le plus favorable à une éducation politique horizontale, permettant à chacun d’écrire. Le peuple parle au peuple. Avec son langage. A partir de son vécu. En fonction de ses intérêts. Sans prétendus représentants auto-proclamés.
Les premiers adeptes prennent le relai et les centres de diffusion se multiplient : forums, sites d’informations participatifs, blogs. Elle y rencontre de nombreux sceptiques et en séduit tout autant. L’impuissance populaire est généralement reconnue. Les moyens à mettre en œuvre pour ré-inventer une démocratie authentique sont davantage discutés.
Mais l’essentiel est là : interpeler les électeurs, les faire cogiter, les (re)politiser.
Pour qu’une idéologie prenne vie, il faut donc en amont qu’elle soit partagée par une masse critique (étape d’inter-subjectivité).
L’utopie démocratique ne se réalisera que si elle est partagée par un très grand nombre d’individus.
C’est pourquoi l’association “Les Citoyens Constituants” a besoin de vous ! Ca sera l’occasion de lier la théorie à la pratique justement, de réunir l’idéologie et sa praxis. Plus il y aura de monde, plus l’idée se diffusera, plus l’expérience démocratique sera intéressante.
Le Cercle des Volontaires encourage leur démarche : elle est d’utilité publique ! Vraiment ! Nous vous invitons à les rejoindre pour répandre ce virus démocratique.
Leur site : http://lescitoyensconstituants.com/
Pour information, l’association recherche actuellement un webmaster pour la refonte de leur site. N’hésitez pas à les contacter !
(417)
Rejoignez aussi la communauté des Gentils Virus sur Google+
https://plus.google.com/communities/101552783457990440558
Morpheus
Et aussi le réseau social des Gentils Virus sur http://ggouv.fr !
En plus il est assez bien foutu ! Rien à envier à google+…
On n’est pas en concurrence, hein 😉
Ce serait bien de travailler en synergie et de communiquer entre groupes de Gentils Virus, je trouve.
Cordialement,
Morpheus
Rejoignez le groupe Facebook des Gentils Virus Belgique !
https://www.facebook.com/groups/600635023284410
Bonjour,
J’aimerais nuancer sur un point : les Gentils Virus ne sont pas pour ou contre l’élection en générale. On nous a accusé d’être des fascistes parce que des gens ont pensé que nous combattions farouchement l’élection sous toutes ses formes.
C’est faux, nous constatons que le principe de l’élection est aristocratique, elle est sensée désigner les meilleurs. Mais nous voyons bien que sans contrôle, ce principe ne fonctionne pas : ce ne sont pas les meilleurs qui sont désignés, mais ceux qui font déjà partie d’un petit groupe qui se partage pouvoir et argent.
Le tirage au sort de citoyens ordinaires pour des mandats courts et non renouvelables permet de s’assurer que les représentants désignés sont parfaitement représentatifs, et hors de tout conflit d’intérêt. Ils seraient un contre-pouvoir et une force de contrôle tout indiquée pour contrebalancer celui des aristocrates.
Les Gentils Virus ne sont pas contre l’élection, ils sont pour le contrôle des pouvoirs en générale, et pour le tirage au sort de l’assemblée constituante en particulier.
Nous parlons de “suffrage universel” lorsque nous déclarons être manipulés (exprès ou non, ce n’est pas tant le sujet) par le système lorsqu’il a recours à l’élection …
et non du principe électif en lui-même, c’est entendu.
Félicitations pour votre progression, je vous aiderai sous une condition que je vais exposer sur le site.
Salut Jean !
Lorsque je dis que vous poussiez à la négation de l’élection, je ne prétend aucunement que vous soyez pour ou contre, là n’est pas mon propos.
Je constate que vous favorisez dans vos débats la contradiction de l’élection en remettant au gout du jour le tirage au sort. C’est à dire que vous présentez une antithèse à la thèse actuelle élection = démocratie.
Et que sans antithèse, c’est à dire sans contradiction, pas d’esprit de synthèse. C’est tout 🙂
C’est plus un message d’espoir sur la prise de conscience virale que votre discours pourrait provoquer.
En espérant m’être mieux fait comprendre !
Etienne Chouard est un farceur ( pour être poli )
Dans le film Dédale Chouard explique parfaitement que nous ne sommes pas en démocratie ( VRAI ) mais sa fausse solution de tirage au sort filtré est une injure au mot démocratie !! voir à 52 mn
http://www.youtube.com/watch?v=_X6oco2-yAY&feature=youtu.be
Une démocratie filtrée n’est pas une démocratie !! C’est une sélection reste à savoir sur quels critères ???
La tête du client ?? Sa réputation ?? Sa couleur de peau ??? Sa fortune perso ?? Sa religion ?? son goût pou la propriété privée et le capitalisme ??
A bas les masques SVP !!
Moi je propose ceci en annonçant la couleur franchement !
Je propose “la démocratie sélective ”
basée sur ces principes fondamentaux
respect des droits de l’homme ( à revoir et améliorer )
respect de la nature et du monde des vivants non humain
respect du partage équitable des ressources
lutte contre toute forme de mafias, sectes, religions, lobbies, trusts, et monopoles
Toute personne étant contre ces principes est filtrée et rejetée….
QUI est partant ?????
TOUT est dans le réglage du filtre !!! donc la constitution de BASE !
RDV ici pour en débattre SANS censure aucune !! même les insultes sont tolérées et OUI c’est du vrai Iségoria pas la FAUSSE des « gentils virus « qui censurent a mort …..( signe de grande faiblesse dans l’argumentation …)
https://www.facebook.com/ConcoursFutureConstitutionFrancaise
Frédéric Pignet
PS : E Chouard a parfaitement raison sur un point nous ne sommes pas actuellement en démocratie !
Bonjour,
J’étais à votre conférence à Romans le 28 novembre (c’est moi qui ai cité le “hiatus”).
Voici les questions qui me viennent après coup :
– vous vous déclarez à la fois souverainiste et citoyen du monde (si j’ai bien entendu) : comment pouvez-vous concilier les deux étant donné que les Citoyens du monde proposent, sur les grands sujets communs (climat, énergie, …) un abandon de souveraineté nationale ?
– en disant “nous” pour les 99% qui ne sont pas le 1% super-riche, donc citoyens ordinaires supposés a priori probres, appelés à rédiger la constitution, qui vous dit qu’au sein de cette catégorie n’apparaîtront pas quelques individus jouant des coudes pour récupérer un pouvoir personnel, donc contraire au “nous” ?
– en supposant une prise de pouvoir dans un pays “souverain” par le biais d’une nouvelle constitution comment échapper aux sanctions économiques de l’oligarchie financière mondiale ?
– enfin que pensez-vous de la proposition “monnaie nationale complémentaire” de Philippe Derdder et André-Jacques Holbeck ?
Cordialement. — Jean-Claude Bidaux —
Je suis 100% pour une Constituante tirée au sort, MAIS 100% contre le tirage aux sorts des députés car pour gouverner l’exécutif à besoin d’une majorité stable pour soutenir une politique générale de la France. Or le tirage au sort serait une proportionnelle intégrale dont les Français ne veulent pas pour les législatives.
Sur le forum du site http://www.ric-france.fr j’ai proposé des modalités de tirage au sort et de fonctionnent. J’ai remis le même texte sur le forum des citoyens constituants il serait bien qu’il y ait critiques et suggestions. Voire un autre texte complet présenté.
Ce qui me semble FONDAMENTAL c’est que Le citoyens constituants et les gentils virus se CONCENTRENT sur la Constituante tirée au sort.
Étienne le dit il faut UNE revendication et être des millions dans les rues pour l’arracher.
Très cordialement
Yvan
Ping : Révolution 2.0 : quenelle, mémétique et démocratie | Taïké Eilée